Le 8/05/2017
Intervention de Daniele Novara.
Bonjour,
voici ci dessous un petit résumé de la méthode de la maïeutique sur laquelle nous avons eu une intervention avec Daniele Novara, dans le cadre de notre projet européen erasmus+ en Italie, début mai.
Méthodes sur les conflits et les querelles entre les enfants.
Proximité familiale et naissance des conflits
La culture italienne est basée sur les relations de la culture méditerranéenne, c’est-à-dire qui est basée sur la connexion, les relations entre les membres de la famille, et de « qui appartient à qui ». (italien « legami »). Les relations entre les membres de la famille sont très très proches et voir envahissantes.
Le conflit devient alors une forme d’expression du besoin de prendre de la distance avec ces membres, et comme ils sont très proches, alors, l’expression de ce besoin se fait de façon parfois très remarquable, comme le conflit.
On a parfois besoin du confit pour prendre de la distance, c’est ce que le conflit apporte, c’est la ressource qu’on peut lui trouver. On peut noter la résurgence de nombreux conflits lors de fête de famille, comme à Noël, par exemple. Cela vous parle-t-il ? Le conflit permet d’avoir la bonne distance entre deux membres d’une famille, ou deux personnes. Il y a une nécessaire construction d’une compétence autour de cette notion de conflit.
Daniele Novara note, d’après ses recherches scientifiques, qu’en Italie, beaucoup d’enfants dorment avec leurs parents très tard (Il fait remarquer qu’il y a une différence dans le fait de dormir ensemble avec ses parents de 3 ans à 7 ans environ. Entre les deux, il y a une zone tampon variable. Ou de trouver des adolescents dormant encore avec leurs parents)
Il est fréquent de rencontrer des adolescents qui dorment avec leurs parents, dans le même lit en Italie. Les parents sont alors très proches des enfants, trop proches ? La proximité induit selon lui, un besoin à un moment de se distancer de ceux-ci, et c’est alors que cette marque de séparation est exprimée par un conflit, une marque de besoin de distanciation très forte. Il devient un régulateur de la distance.
Un autre point à noter est qu’il y a aussi une confusion sémantique en Italie entre « conflits » et « guerre ». Remarquable dans les journaux pendant la guerre dans les Balkans par exemple.
Une autre chose à prendre en compte est que si nous avons une difficulté à gérer un conflit, alors cela est vraiment vécu comme un échec, comme une tragédie, une catastrophe. Or le conflit, nous dit Daniele est une composante de la vie.
Les conflits peuvent déboucher sur des guerres à cause de la peur qui en est issue car la peur engendre la violence, il s’agit de travailler sur ces notions afin de désactiver cette violence.
Revenant aux querelles entre les enfants …
C’est ainsi que l’on peut noter des querelles entre les enfants lorsqu’ils semblent, et sont assignés comme coupables. Dans leurs échanges, ils peuvent aller jusqu’aux coups, cependant, ils n’ont pas forcément l’intention de faire mal.
Chez les enfants, 90% des conflits viennent parce qu’ils veulent s’approprier le jeu de l’autre. Or, les enfants explorent, et il s’agit aussi de garder en mémoire le concept de neurones miroir. On peut aussi se référer à Piaget, en regard au mensonge et à l’appartenance des choses. Leur intention première est l’exploration … La découverte du monde, et non la volonté de faire mal.
Les enfants ont une grande notion du présent et de la mémoire opérationnelle (Ils mémorisent à travers le corps et le mouvement). Ils ne sont pas orientés vers le futur.
Souvent, les enfants réalisent des actions afin de plaire à leur parents, afin de les imiter, de coopérer, de s’adapter.
Entre 7 et 12 ans, ils s’identifient à leur parents. L’enfant a une figure d’attachement à un parent. Cela pose parfois le problème du genre, c’est une des plus grandes difficultés pour l’enfant. C’est plus difficile pour l’enfant, si la société pousse à l’instabilité. Et c’est encore plus difficile de se construire en tant que femme. Vers 11 ans, la femme doit dépasser sa mère. C’est alors qu’il y a un conflit fort qui naît bien souvent.
La maïeutique.
Le principe de base de la maïeutique, la méthode de Daniele Novara, est qu’éduquer est de travailler sur de bonnes habitudes, mais pas dans la peur. Il s’agit de créer un bon environnement. La punition crée une dépendance chez l’enfant. L’éducation est un acte, l’acte de rendre l’enfant autonome. Il s’agit d’avoir un cadre. C’est alors un travail d’équipe entre les adultes, il s’agit aussi de s’adapter à l’âge, d’avoir des règles claires avec des différences entre les moins de 10 ans et les plus de 10 ans. (Pour les enfants de plus de 10 ans, il s’agit alors de négocier afin de donner du sens aux actions.) Et il s’agit d’avoir une distance suffisante avec l’enfant.
Quelles règles pour mieux se quereller ?
Souvent, les adultes réagissent ainsi : « Qui a fait ça ? Qui a commencé ? Bon, tu t’excuses et tu lui fais un bisou. » C’est la création du syndrome de la cour de justice. Le syndrome de la bonne petite fille qui n’est pas autorisée à vivre ce qu’elle ressent. Il s’agit d’éviter les jugements, d’éviter d’être en tant qu’adulte, dans la peau, et la position du juge.
Finalement, se quereller, c’est apprendre à se connaître, apprendre à vivre avec les autres.
1) ne pas chercher de coupable
2) ne pas chercher la bonne solution
3) encourager les versions bipartites de la querelle
4) encourager l’écoute et le compromis entre les deux parties.
5) Proposer d’attendre une minute si cela ne vient pas. (en général cela vient)
6) L’important est que cela vienne des enfants !
Des outils
La corde, la pelote de laine. Chacun des enfants tient un bout de la pelote de laine lors d’une querelle. Les enfants sont assis l’un en face de l’autre, et ils tiennent la pelote de laine. A chaque fois que quelqu’un parle, il tient la pelote de laine dans sa main. Lorsqu’il a fini, il redonne la pelote à l’autre. On ne peut parler que lorsque l’on a la pelote dans la main.
A la fin, on peut voir la matérialisation des échanges avec les fils tendus entre chaque personne.
Des cartes d’émotions.
Il s’agit de la météo des émotions symbolisées par des cartes où il y a différentes émotions, avec un nom en dessous de ces personnages, un mot qui nomme l’émotion concernée. On propose les cartes aux enfants et ils choisissent ce qui correspond le mieux à leurs émotions du moment. Ils peuvent alors exprimer ce qu’ils ressentent à l’intérieur d’eux-même. ex. « ça fait comme très chaud à l’intérieur de moi. » « je sens ma gorge qui est serrée comme un bouchon à l’intérieur d’elle. »
On peut aussi dessiner l’émotion que l’on ressent sur une feuille, au crayon, à la peinture …
Et pour les plus grands, on peut alors, écrire avec des mots ce que l’on ressent.
L’avantage de ces pratiques ? Prendre de la distance avec la situation, exprimer ses émotions, les nommer, les repérer, trouver des ressources.
Une fois que ces émotions ont été exprimées, il s’agit alors que les enfants trouvent un compromis entre eux.
Le coin des conflits : dans la salle de classe ou dans la cour, il peut y avoir un endroit aménagé pour « le coin des conflits ». Il peut être matérialisé par des bancs ou des chaises, les enfants peuvent être l’un à côté de l’autre, ou les uns en face des autres. Lorsqu’une querelle apparaît, ils ont la possibilité d’aller s’asseoir sur ces bancs et chaises afin d’exprimer ce qu’ils ont à l’intérieur d’eux-même.
1) L’enfant a besoin d’avoir un développement de sa capacité d’autorégulation, il s’agit de trouver un accord pour l’intérêt commun.
2) Il s’agit d’apprendre à se décentrer afin de ressentir l’empathie. Apprendre à regarder les problèmes d’un autre point de vue.
3) Il s’agit d’être créatif, et aussi d’accepter d’avoir des points de vue divergents.
« Les mots sont utilisés pour se quereller sans blesser les autres » Reggio Emilia.
– 3 à 5 ans : Cette technique marche très bien pour les enfants de 3 à 5 ans, moins pour les moins de 3 ans.
– de 6 à 10-11 ans : lorsqu’il y a une intervention adulte, alors les conflits durent plus longtemps. L’important est de ne pas intervenir. L’important n’est pas de trouver une solution, c’est que les enfants trouvent leur solution, et s’expriment à propos de ce conflit. Possibilité de passer par l’écrit ce qui permet de prendre de la distance et d’écouter. Chacun écrit sa version et chacun lit sa version.
– + de 11 ans : concernant les enfants de plus de 10 ans, il s’agit alors de faire venir un médiateur représenté par un enfant, un pair, qui sera le médiateur entre les deux autres enfants. Il s’agit d’entraîner un enfant volontaire, qui peut être médiateur dans un groupe.
La position de l’adulte est ultimement importante car elle conditionne réellement le comportement de l’enfant à cette suite :
Qu’est-ce qu’un parent émotionnel ? Emotif ?
Il demande des conseils pour les enfants
Il se sent parfois blessé
Il est en compétition avec les autres parents
Il a peur pour les enfants
Il utilise des exhortations, des ordres plutôt que des règles.
Qu’est-ce qu’un parent organisé ?
Il a des règles claires
Il négocie les règles avec les ados
Il remplace les ordres par des règles
Il parle avec les autres parents de l’éducation de ses enfants
Il gère les conflits avec les enfants
Il organise le temps.
Nous avons un peu échangé sur cette dernière idée, et nous avons continué à suivre nos échanges sur la parentalité consciente au sein de nos interventions.
En espérant que ce résumé trouve écho en vos pratiques …